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La jeune fille en rouge
11 janvier 2002

BOURG EN BRESSE-PARIS-LONDRES-NUMBAI (Inde)

« Ne compare pas Bombay à Londres, ne compare pas l’Inde et l’Europe, vis cela comme une expérience, une fabuleuse expérience, respire, observe, écoute et surtout prends ton temps, immanquablement tu reviendras »

A quelques mots près voici ce que vient de me souffler à l’oreille, cet ingénieur chimiste du New Jersey assis à ma gauche, quelques minutes avant notre atterrissage.

J’ai scruté par toutes les pupilles de ma tête, j’ai humé de toute mon âme, oui j’en ai humé des odeurs de fenugrec particulièrement tenaces, aisselles mal rincées et chemises détrempées.

Et j’ai attendu. Ce n’est pas faute d’avoir attendu.

Le long serpent qui vomit des montagnes de bagages s’est finalement endormi, l’aéroport s’est vidé, l’air est devenu un peu plus respirable, une charmante hôtesse, vêtue d’un costume bleu citron et coiffée comme une secrétaire médicale, m’a invitée à remplir un formulaire.

4 heures du matin.

J’ai d’autres ambitions que de remplir des formulaires à 4 heures du matin, à me débattre pour obtenir un tampon que se partagent trois fonctionnaires inactifs, à aller chercher une improbable signature quelque part par-là, au fond du couloir à gauche.

Je me sens un peu comme un escargot sans sa coquille, mais toutefois je reste confiant, mon sac à dos va arriver demain, il a du s’égarer lors du transfert à Londres.

Qu’elle était belle cette petite mendiante, à la sortie de l’aéroport, avec les reflets de lune qui ricochaient sur ses dents blanches. A peine le temps de glisser un biscuit aux noisettes entre ses mains implorantes, que le chauffeur de taxi la chassait à coups de chiffon, telle une vulgaire et indésirable mouche bleue.

Cette scène a suffit à me faire comprendre pourquoi, ici, tous les vols internationaux arrivent de nuit, ainsi la misère ne nous éclate pas à la figure, elle se dissimule derrière les heures les plus sombres. Je devine, j’imagine, mais je ne discerne guère la sordide réalité.

Le chauffeur de taxi connaissait parfaitement le patron de l’hôtel que je venais de lui indiquer, je crois même que c’était son frère ou son cousin. Il s’avéra bien moins prétentieux, lorsque arrivés dans le quartier de Colaba, après plusieurs détours et de nombreuses hésitations, il du compter sur les informations de quelques noctambules, bien heureusement affables, pour finalement me déposer quelque part.

Une impasse peu engageante.

Une porte.

Elle est barricadée.

Une grille, lourde, rouillée, coincée.

Tel un rat je me faufile en dessous.

L’escalier, sombre, humide, maculé de tâches rougeâtres.

L’odeur, juste celle de l’urine.

Des sacs sur les marches.

Non, pas des sacs, des corps.

Marches d’escaliers en guise de lit.

Je m’entrave, pas de réactions.

…A quoi rêvent-ils ?

2ième étage, j’entends gémir.

Un vieux recroquevillé sur un rebord de fenêtre ouvre un œil.

Le referme.

Et là, un enfant ?

3ième étage, l’hôtel…enfin !

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